Publié le 17 décembre 2020, par
Nous devions nous rencontrer à la bibliothèque de Stavelot, lieu où Christel Etienne, coordinatrice de réseau, exerce la majeure partie de sa fonction mais le dictat du virus nous force à modifier nos plans à deux reprises ! Aussi, décidons-nous de postposer à des jours plus cléments notre redécouverte de cette si belle et imposante abbaye, centre de l’activité culturelle de Stavelot depuis sa grandiose restauration. Et c’est donc par téléphone que nous dialoguons avec Christel Etienne, auparavant dirigeante de la bibliothèque et, depuis 2008, coordinatrice du réseau « Amblève-Lienne » : une mission spécifique, atypique et peu connue qu’elle a très aimablement accepté de nous présenter. Le téléphone sonne, une voix cristalline et manifestement disponible nous répond : la conversation peut débuter…
« Le territoire sur lequel j’exerce ma mission contient plus d’arbres que d’habitants ! », déclare-t-elle en guise d’introduction et, on le devine, avec un léger sourire aux lèvres ! Si la façon de planter le décor revêt, il est vrai, un aspect charmant et onirique, il n’en reste pas moins que la coordinatrice donne le ton ! Les quatre communes qui font partie du réseau, Stavelot, Stoumont, Trois-Ponts et Lierneux, se répartissent en effet sur une vaste superficie de 354 km2 au cœur de l’Ardenne en Province de Liège : une zone faiblement peuplée, mal desservie par les transports en commun avec six implantions particulièrement éloignées les unes des autres et possédant, chacune, leurs particularités ! Face à un tel paysage, certes magnifique mais semé d’embûches au niveau de la communication, il n’est pas facile pour un réseau de fonctionner et d’atteindre ses objectifs : fédérer les forces de chaque implantation pour mieux avancer sur le terrain de la lecture publique.
Conscientes de ce contexte peu propice, les quatre communes décident, dès la création du réseau « Amblève-Lienne » en 2008, de lui octroyer les moyens nécessaires pour travailler dans de bonnes conditions et pouvoir déployer ses projets. Un poste de coordinatrice dont le salaire sera réparti entre les différentes communes au prorata du pourcentage de la population est d’emblée créé, pratiquement sur mesure, et est attribué à celle qui fut dirigeante de la bibliothèque de Stavelot pendant onze ans. C’est ainsi que Christel Etienne endosse le tout premier poste de coordinatrice de réseau au sein du secteur. « Cette fonction me correspond très bien », nous confie-t-elle. « Je suis une organisatrice née et je jongle facilement avec l’administratif que j’ai eu l’habitude de maîtriser lorsque j’étais dirigeante. Ce sont là deux atouts essentiels pour assumer cette fonction. »
Une mission qui, précisément comporte plusieurs facettes. Premièrement, prendre en effet en charge tout ce qui concerne l’administratif des quatre bibliothèques concernées : gestion des dossiers financiers, rapports d’activités et demandes de reconnaissance. « Il s’agit de la base essentielle de mon travail », explique Christel Etienne. « Je constitue le maximum du dossier. S’il me manque des informations, je me tourne vers chaque responsable de bibliothèque pour ensuite monter un dossier commun étant donné que nous sommes considérées comme une seule et unique bibliothèque référente. » Un deuxième axe consiste à instaurer une synergie qui permette de mettre sur pied des projets que, seule dans son coin, une bibliothèque ne pourrait pas mener. Comme, par exemple, la création d’expositions et de pistes pour les animer. Cette simplification du travail évite de faire des doublons, et permet de promouvoir une économie de moyens, de temps et, par conséquent de favoriser une meilleure circulation de l’information au cœur du réseau. Enfin, la coordinatrice assume un rôle essentiel au niveau des différents PO. « Chaque pouvoir organisateur a des attentes différentes et des façons de fonctionner qui sont parfois diamétralement opposées. Arriver à les mettre d’accord me demande une très bonne préparation de mes dossiers mais aussi de l’adaptation. C’est une réelle mission de concertation qui débouche sur la présentation du dossier soumis à un comité qui reprend les directeurs généraux, les échevins, et les bibliothécaires responsables de chacune des communes et ce, une ou deux fois par an. »
Mais là ne s’arrêtent pas les différentes missions de la coordinatrice qui, au-delà de l’administratif, souhaite également mettre la main à la pâte, se frotter au quotidien des bibliothécaires en assumant différentes missions d’ordre plus logistique : une façon pour elle de mieux appréhender la réalité de terrain de chaque bibliothèque. C’est ainsi qu’elle assure les remplacements en cas de participation du personnel à des formations ou en cas d’absence pour cause de maladie et gère également le prêt inter en répartissant les livres dans les différentes bibliothèques grâce à un véhicule de fonction. Ce contact avec le terrain est primordial : « Je veux continuer à pouvoir faire du prêt de manière régulière car, sans le contact avec les lecteurs, je pourrais me couper de la réalité que vivent mes collègues et moins bien comprendre leurs attentes qui sont parfois si différentes en fonction des implantations. »
Et en effet, si le territoire possède un dénominateur commun au niveau de son faible taux de population ou de ses nombreuses ressources en matière de nature et donc de tourisme, il reste que chaque implantation présente un tissu social bien spécifique. Par conséquent, chaque bibliothèque dispose d’un maillage de partenaires différents, que ce soit en matière culturelle ou scolaire. Cette disparité induit, bien évidemment, la manière de travailler et d’envisager les projets. Ainsi, alors que la bibliothèque de Lierneux compte l’ATL (Accueil Temps Libre) comme unique association partenaire, Stavelot et Trois-Ponts ont, sur leur territoire, un tissu davantage étoffé d’associations. Le même constat se fait au niveau des écoles, avec des établissements d’enseignement secondaire à Trois-Ponts et Stavelot et uniquement des écoles fondamentales à Stoumont et Lierneux… « Il faut jongler avec cette importante disparité et faire profiter chaque implantation des expériences communes. On ne se dit pas « ce projet est fait chez moi et il reste chez moi ! » En fait, on fait un mixte et on mélange. Aujourd’hui, nous arrivons à travailler dans cet état d’esprit, mais il a fallu trois ans pour instaurer cette dynamique. Et bien entendu, bien que l’on réfléchisse « réseau », chacune conserve néanmoins ses particularités et je pense que si j’avais poussé à une uniformisation pure et dure le réseau n’aurait pas fonctionné. »
Jongler avec les disparités ne s’improvise pas et les compétences dont doit faire preuve la coordinatrice de réseau sont multiples et, à nouveau, très diverses. Ainsi, outre disposer des compétences pour démêler les arcanes administratifs, Christel Etienne doit faire preuve d’aptitudes relevant davantage des ressources humaines : pouvoir être à l’écoute, faire preuve de souplesse dans son organisation et, en définitive, avoir une importante faculté d’adaptation. « Parfois on me téléphone pour avoir un livre que je ne devais pas apporter ce jour-là mais je m’adapte s’il y a urgence ! Une malade et, hop, je m’adapte et je vais faire le prêt. Je me sens flexible et polyvalente puisque je dois pouvoir assumer ma fonction de coordinatrice et, parallèlement, la fonction plus classique de bibliothécaire. C’est très riche, varié et très complet et c’est motivant car ma fonction revêt un aspect non répétitif ou routinier qui me plaît beaucoup. »
Une belle variété qui se retrouve également au niveau de l’équipe des huit bibliothécaires originaires des quatre bibliothèques membres du réseau et qui, chacune avec ses intérêts et profils bien spécifiques, constitue une équipe unie et très collaborative, sans laquelle Christel ne pourrait pas travailler. « Nous avons la même vision du métier et appartenons, plus ou moins, à la même tranche d’âge. Les oppositions sont rares et, si l’on n’est pas d’accord, on n’entre jamais en conflit car il y a un grand respect de l’opinion de l’autre. » Une véritable chance respective et un fonctionnement productif qui devrait laisser rêveur plus d’un bibliothécaire ? « Oui, chacune a de la chance et chacune a la volonté de travailler ensemble : c’est un bien précieux qui nous permet d’avancer pour promouvoir la lecture sur notre riche et particulier territoire et je tiens à remercier toutes mes collègues car, moi toute seule, je n’y arriverais pas. »
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