L’Etoile de la mer

Publié le 15 janvier, par Valérie Detry


KHOURY Elias, L’Etoile de la mer, Actes Sud, 2023

Après La Porte du Soleil (Actes Sud 2022), grand prix littéraire palestinien, L’Étoile de la mer est le nouveau roman labyrinthique et poétique du Libanais Elias Khoury. Deuxième tome de la trilogie Les Enfants du ghetto, il donne à entendre, à travers les vies successives de son énigmatique héros-narrateur Adam, tourmenté par la perte et le déracinement, la voix des musulmans tout autant que celles des chrétiens et des juifs. À l’instar de nombreux écrivains-poètes arabes en exil, son roman continue d’explorer les thèmes de l’identité, de la mémoire ou de l’oubli délibéré ainsi que les relations entre la Shoah et la Nakba. Mais il ouvre aussi un nouveau regard sur le conflit actuel à travers les yeux de ce premier enfant du ghetto de Lod où l’armée israélienne enferma les centaines d’habitants échappés des massacres de sa prise, lors de l’été 1948. À quinze ans, tentant de fuir les blessures nées d’une enfance captive, Adam quitte, seul, Haïfa et la maison où sa mère Manal n’est plus que l’ombre d’elle-même. La sensation de se noyer l’accompagne comme celle de renaître sous une pluie torrentielle à Stella Maris, connue aussi sous le nom d’Étoile de la mer. Sans jamais clarifier les ambiguïtés autour de son origine ou de sa foi, Adam Dannoun-Danön grandit au gré de ses multiples rencontres, allers-retours entre l’histoire et la fiction, s’efforçant d’incarner celui que les autres voient en lui. C’est après des études de littérature hébraïque qu’il découvre, à travers la musique arabe répétitive d’Umm Khalthoum, un nouvel horizon d’où jaillissent les vagues de l’amour. L’Étoile de la mer déstabilise les attentes du lecteur pour toucher au sens de la beauté de l’existence ainsi qu’à la paix et nous invite à mieux comprendre ce qui se joue sous les décombres de Haïfa.