Partages d’expériences

Une journée de dialogue avec Etty Hillesum

Publié le 22 avril 2008, par Gérard Durieux


Le samedi 8 mars dernier, le Centre "Lumen Vitae" accueillait une cinquantaine de personnes de tous âges autour de Etty Hillesum afin d’éclairer une question : « En quoi sa pensée et sa vie si brève (1914-1943) rejoignent-elles nos interrogations ? ».

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Créé en 1935 à Bruxelles par les Jésuites, le Centre « Lumen vitae » comporte plusieurs départements. Alors que son « Ecole de catéchèse » (ESC) propose divers parcours de formation pour animateurs pastoraux, son « Institut international » accueille des étudiants belges et étrangers pour une spécialisation en Catéchèse.

Une revue et de nombreuses publications de qualité diffusent l’apport essentiel du Centre à la réflexion ecclésiale.

Parmi ses nombreuses propositions, le Centre consacre
une douzaine de samedis dans l’année à découvrir des
« lieux actuels » où culture et foi dialoguent
 : cinéma, ateliers d’art, littérature, le clown... Chaque rencontre animée par un spécialiste débouche sur quelques propositions pédagogiques et pistes d’animation...

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On sait que cette jeune hollandaise d’origine juive, morte à Auschwitz à l’âge de 29 ans, nous est connue à travers son journal et ses lettres. La 5ème réédition critique en néerlandais vient de paraître chez Balans.

En français, nous ne disposons que du tiers de cet ensemble traduit en 1981 par Philippe NOBLE : Une vie bouleversée et Lettres de Westerbork (Seuil).

La traduction intégrale en français est annoncée pour cette année, l’accueil et le retentissement des premiers textes étant tels, en effet, que le traducteur s’est livré cette fois à un travail minutieux.

 Dans un premier temps, Isabelle Meeûs auteur de Prier 15 jours avec Etty Hillesum, nous retrace avec passion le parcours saisissant de la jeune étudiante en droit. Parlant l’allemand et le russe, gourmande de la vie, vive et douée, mais empêtrée dans le chaos de ses relations affectives, elle entreprend un travail personnel exigeant qui la conduit en deux ans et demi à la rencontre décisive avec Dieu et à se solidariser de façon bouleversante avec son peuple broyé par le régime nazi.

 Avec une finesse qui révèle une profonde fréquentation de l’intégralité des écrits et l’empathie d’une « âme-sœur », l’animatrice relève ensuite des expressions, propose des mots-clés pour « écouter Etty du dedans ». Elle pose des jalons pour que chaque participant(e) puisse aller plus loin dans la découverte de cette personnalité si moderne.

Et pour relire en « je » sa propre aventure spirituelle : en quoi ce destin singulier, vécu dans l’enfer d’une situation-limite, en dehors de toute appartenance religieuse, peut-il m’aider à marcher aujourd’hui mon propre chemin ?

 En choisissant trois extraits majeurs du journal pour une lecture commune, Isabelle Meeûs invite alors au partage des réactions, des questions...

Quel est donc le Dieu auquel Etty s’adresse dès mars 41, quand son thérapeute et amant l’invite à écrire ? Qu’est-il advenu de cette fulgurante rencontre entre la jeune déportée et « son Dieu » d’Octobre 42 à Novembre 43, puisque ses derniers carnets emmenés à Auschwitz n’ont pas été retrouvés ?...

Cette journée dense et riche s’achève sur l’indication précieuse de quelques outils, livres, articles, initiatives diverses (théâtre, peinture, poèmes...) autour de cette figure attachante.

Ces heures auront fait naître ou renouvelé une connivence, donné le goût et l’élan de retourner aux écrits, de partager peut-être avec d’autres l’éblouissement d’une rencontre, la lecture des mots quotidiens d’une jeune femme « pleinement femme » qui se rêvait écrivain et qui nous touche du fond de son silence. (1)

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Pour aller plus loin...

 Isabelle MEEUS, Prier 15 jours avec Etty Hillesum, Nouvelle Cité, 2004

 Sylvie GERMAIN, Etty Hillesum, Pygmalion, 1999.
La romancière y confie une évidente parenté d’âme et interroge les choix d’Etty au cœur de l’horreur. Dans une langue superbe qui s’affronte au mystère du mal.

 Ingmar GRANSTEDT, Portrait d’Etty Hillesum, Desclée de Brouwer, 2001, qui propose la meilleure approche psychologique d’Etty et les pages les plus justes sur sa relation avec Julius Spier, son « mentor ».

Pour info...

Une session à « La Pairelle » (Namur) du 26 au 28 septembre 2008 abordera à nouveau cet itinéraire