Avec Agnès Henrard, auteure et animatrice au CEC « Plume et pinceau » de la Maison de la Poésie d’Amay

Publié le 23 août 2017, par Sylvie Hendrickx


Accueil et écriture
C’est à l’occasion d’un atelier d’écriture qu’elle anime que nous rencontrons Agnès Henrard. Sincère et spontanée, cette auteure et animatrice à la Maison de la Poésie d’Amay évoque pour nous les socles de son parcours personnel et professionnel guidé par une importante soif d’ouvertures et d’accueil : envers les arts, les différentes formes d’écriture mais aussi tous les textes et créations des participants de ses ateliers qu’elle rassemble, dans une belle mixité, autour d’un projet d’expression personnelle.

S.H. Vous travaillez à la Maison de la Poésie d’Amay depuis près de 25 ans et y animez des ateliers d’écriture depuis bientôt 17 ans dans le cadre du CEC "Plume et pinceau". Pouvez-vous nous retracer les objectifs de ces ateliers et la manière dont vous les concevez ?

A.H. Ces ateliers s’apparentent à un espace d’expression, un lieu où chacun est invité à venir déposer en toute confiance ce qu’il vit à l’intérieur que ce soit par le biais de l’écriture ou de l’expression graphique. Pour faire naître cette expression, nous avons recours à différents éléments révélateurs tels que des reproductions d’œuvres d’art, des textes, de la musique, des objets ou de la photographie. Parallèlement à cet objectif d’expression personnelle, nos ateliers répondent également à des critères d’émancipation artistique, sociale et citoyenne. Car, tout en sensibilisant à l’art et à la poésie, nous sommes vigilants à proposer aux participants des outils qui suscitent la réflexion critique, l’ouverture au monde et ce, au travers de différents thèmes. écriture personnelle est venue bien avant. J’écris depuis l’enfance et j’ai toujours gardé le lien avec cette forme d’expression qui m’aide véritablement à voir plus clair en moi.

S.H. « Plume et pinceau », l’appellation même de ces ateliers met en valeur une dimension artistique pluridisciplinaire. Comment l’envisagez-vous concrètement ?

A.H. Ces ateliers ont été mis sur pied par la Maison de la Poésie bien avant mon arrivée, suite à l’initiative des plasticiennes Annie Gaukema et Dominique Grodos. Celles-ci étaient convaincues de la nécessité d’introduire dans les écoles cet accès à la culture pour mieux « comprendre et vivre l’art d’aujourd’hui ». L’écriture était cependant peu présente et j’ai proposé de l’amener de manière récurrente, avant ou après chaque atelier d’arts plastiques comme deux voies d’expressions complémentaires. Dans tout groupe, il y a des personnes qui se sentent plus à l’aise avec la peinture, le dessin et d’autres avec l’écriture. Notre défi est d’amener chacun à vivre chaque langage dans le plaisir et à prendre conscience qu’il est capable de créer, quel que soit le type d’expression.

S.H. Vos ateliers tentent donc de démystifier l’acte d’écriture ?

A.H. Effectivement, un de mes ateliers s’appelle d’ailleurs « Ecrire comme on respire », dans l’idée d’aborder l’écriture sans en avoir l’air, naturellement, intuitivement. On retrouve une démarche similaire dans les ateliers d’« Ecriture méditative » que j’ai mis en place cette année et qui proposent des méditations guidées visant à être davantage présent à soi-même, à l’écoute de son ressenti et ouvert aux images qui nous traversent pour voir émerger une écriture libérée et enrichie. Je « guide » ces méditations parce que les participants n’ont pas l’habitude de ce type de démarche. Or, l’écriture, tout comme la méditation, sont des processus accessibles à tous dans une grande simplicité.

S.H. La dimension collective occupe également une place importante dans vos ateliers…

A.H. Effectivement, amener le collectif avec ses valeurs d’entraide, de coopération et de co-création, est vraiment quelque chose d’essentiel à l’heure actuelle ! Bien sûr, cette démarche engendre parfois un peu de réticence car il faut parvenir à sortir de soi pour s’adapter à l’autre. Mais, au final, cela amène toujours la satisfaction d’avoir créé ensemble. Chaque année, au printemps, nous organisons par ailleurs le « Nouvel an poétique », notre grande fête des langages et expressions. Celle-ci est l’occasion de lancer le nouveau thème annuel des ateliers mais surtout d’exposer les créations plastiques et de présenter les deux ou trois recueils collectifs que nous publions chaque année à partir des nombreux textes des participants à nos ateliers.

S.H. Quelles sont les évolutions marquantes qui ont ponctué le parcours de ces ateliers ?

A.H. En effet, je peux parler de véritable évolution et je m’en réjouis ! Tout d’abord au niveau du public puisqu’au départ j’animais essentiellement des ateliers pour enfants. Ensuite, j’ai commencé à organiser des ateliers pour adultes où j’ai appréhendé des techniques différentes, expérimenté d’autres outils, renouvelé les propositions pour atteindre davantage de profondeur. Evolution aussi quant au public adulte. En effet, actuellement, je travaille avec des groupes qui rassemblent tous les milieux : que ce soit des personnes en insertion sociale, des participants extérieurs, travailleurs ou retraités. Une belle mixité !

S.H. Et une riche panoplie de techniques d’écriture que vous souhaitez partager !

A.H. En effet, depuis quelques années, je donne des formations aux techniques d’animation d’ateliers d’écriture pour les enseignants, les animateurs et les bibliothécaires. Ce travail m’oblige à creuser cette matière davantage encore et me permet de mettre au service de ce public mon expérience de terrain et les outils que j’ai expérimentés. Je pense que, dans le secteur de l’animation, si nous voulons fidéliser un public et garantir une qualité, nous sommes tous obligés d’évoluer sans cesse !

S.H. Et votre démarche d’écriture personnelle, qui a débouché sur la publication de plusieurs recueils poétiques, est-elle venue avant ou à la suite de l’exercice de votre métier d’animatrice ?

A.H. L’exploration de mon écriture personnelle est venue bien avant. J’écris depuis l’enfance et j’ai toujours gardé le lien avec cette forme d’expression qui m’aide véritablement à voir plus clair en moi.

S.H. Quelles sont les personnalités ou les rencontres qui ont été déterminantes dans l’éclosion de cette démarche d’écriture personnelle ?

A.H. Mon père, Jacques Henrard, qui était écrivain, est la première personne à avoir joué un rôle déterminant dans ma vie. Il m’a toujours encouragée à écrire et, dans une maison emplie de livres, j’ai pu, très jeune, m’imprégner de poésie. Adolescente, j’ai également eu la chance d’avoir un très bon enseignant qui nous a sensibilisés à la poésie symboliste, à l’univers de Rimbaud que je vénérais, tout en nous encourageant à écrire et à associer musique et poésie.

S.H. Y-a-t-il également des poètes ou écrivains qui vous accompagnent plus particulièrement dans la préparation de vos ateliers ?

A.H. Effectivement, travailler à la Maison de la poésie d’Amay, qui abrite les éditions L’arbre à paroles et Maelström, c’est se tenir à la source de nombreuses publications d’auteurs contemporains francophones mais aussi étrangers, et y puiser, avec bonheur, une matière précieuse et vivante pour induire et nourrir mes ateliers. Parmi ceux qui m’ont particulièrement accompagnée, je citerais les livres de la collection If dirigée par Antoine Wauters ainsi que les auteurs Karel Logist, Doina Ioanid, Ben Arès, Anne Versailles, Julie Remacle, Olivier Dombret, Ritta Baddoura…

S.H. Finalement, vous sentez vous davantage plume ou pinceau ?

A.H. Je me sens davantage plume que pinceau dans mon langage le plus familier et maîtrisé, mais je dessine aussi depuis longtemps ; j’explore, je joue, j’ai besoin de ce contact avec les couleurs, les matières... Le fait de créer, de donner forme à ce qui me touche, me bouleverse, est une réelle jubilation, un vrai cadeau !

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