Synergies "Ecoles-bibliothèques"

Quels rapports entre le public scolaire et la bibliothèque publique ?

Publié le 27 octobre 2006, par Françoise Vanesse


A l’occasion d’une Journée de réflexion organisée par le CSBP le 25 septembre dernier à « La Marlagne », nous avons assisté à un atelier sur le thème des rapports existants entre le public scolaire et la bibliothèque publique.

Important succès pour cet atelier structuré et animé par Jean-Claude Tréfois.

Dans une ambiance conviviale et très active, une cinquantaine de participants particulièrement motivés ont fait part de leurs expériences, de leurs interrogations mais surtout de leur soif de repaires et de projets construits pour mieux avancer dans ces collaborations.

Pas de doute, le sujet relatif aux rapports
« écoles-bibliothèques » motive voire passionne les bibliothécaires...

Et quand Jean-Claude Tréfois interroge l’auditoire sur la question relative au bien-fondé de consacrer de l’énergie à ce rapprochement, la réponse est : oui !

Mais, parallèlement à cette volonté quasi unanime de tisser des liens avec le monde de l’enseignement, on est par contre surpris de voir surgir une quantité
d ’interrogations, de doutes sur le sens de la démarche et, deuxièmement, sur la manière d’aborder ces collaborations
 !

Ces doutes, sur le sens du travail, nous en avons relevé quelques-uns...

 Ces collaborations « écoles-bibliothèques » débouchent-elles sur une fidélisation du public ? Quelle est la proportion d’enfants qui reviennent à la bibliothèque en dehors du temps scolaire et en famille ? Une bibliothécaire, particulièrement intéressée par le sujet, s’est posé la question. Elle déclare que, selon son expérience, plus ou moins 10 % des enfants s’inscrivent de manière isolée après le passage avec la classe. Mais seulement 5 % continuent à fréquenter la bibliothèque de manière assidue... Officiellement cependant, nous ne disposons d’aucun chiffre...

Autres doutes...

  Travaille-t-on dans le cadre d’un plan de développement de la bibliothèque ou de la lecture ; les deux peut-être ?

  Avons-nous assez de personnel pour l’accueil des classes ? Que viennent-elles précisément chercher ? Et que devons nous leur apporter précisément ?

Parallèlement à ces doutes sur le sens du travail, existent également de nombreuses interrogations sur la façon de vivre ces collaborations.

 Comment les bibliothécaires doivent-ils se positionner face à l’accueil des classes ?

 Doivent-ils proposer de l’animation en plus du prêt ? Mais quelle casquette alors endosser ? Celle du bibliothécaire ou celle de l’animateur ?

 Sommes-nous animateurs ? Possédons-nous toujours la formation et le temps nécessaires pour organiser des animations ? Avec quelles classes ?

Fort heureusement, face à cet important terrain mouvant qui voit grandir les doutes, des certitudes existent !

Celles-ci sont nées de la volonté des bibliothécaires de se positionner comme une profession en recherche de sens ... et de solutions.

1. Ainsi, il apparaît clairement, lors de cet échange, que les bibliothécaires désirent s’affirmer comme des professionnels de la lecture revendiquant le droit à travailler au cœur de projets construits dans le respect et la confiance mutuels.

« Il faut éviter de se parsemer, nous devons établir des projets, des contrats avec l’enseignant ».

Cet aspect du projet est en effet capital. « Nous devons nous positionner clairement : que viennent chercher les classes ? Que leur proposons-nous ? Il est nécessaire d’établir un véritable contrat qui permet de travailler sur le long terme ».

« Moi, j’ai fait la révolution", explique cette bibliothécaire. Je ne prête plus de livres car j’en avais marre de voir débarquer une enseignante n’importe quand, sans projet, sans planning. Je me sentais utilisée et je n’avais pas l’impression de bien travailler car, en plus, les enfants n’avaient pas le libre choix. Ils devaient choisir en fonction des critères de l’enseignant ».

En conclusion sur cette question, Laurence Lefebvre, bibliothécaire à La Louvière, enchaîne en citant l’exemple de sa bibliothèque qui établit un véritable contrat avec les classes. Cela permet certainement de mieux travailler sur le long terme indispensable.

2. Lors de cette discussion, apparaît nettement le souhait des bibliothécaires de baliser leur profession et de s’interroger sur leurs ressources et sur les axes de leur métier.

Il faut en effet bien constater que le bibliothécaire ne peut pas être à la fois spécialisé en écriture, en lecture d’albums, en expositions, en informatique, etc. Il faudrait pouvoir disposer d’un pool d’animateurs spécialisés.

3. En conclusion, que retenir ?

Le besoin de décloisonnements, de concertations, de coordinations est évident.

Par exemple, si la majorité semble travailler avec l’enseignement primaire, certains bibliothécaires sont là pour rappeler à l’auditoire qu’il existe d’autres niveaux d’enseignement parfois oubliés. « Elargissons nos horizons : il est possible de travailler avec le primaire, certes, mais n’oublions pas par exemple l’Enseignement de Promotion Sociale ».

Et un participant de citer la création d’un Centre de Documentation spécialisé dans un établissement de ce type où les mécaniciens et les plombiers viennent emprunter des revues spécialisées.

Un autre exemple concerne la collaboration avec l’enseignement spécial, moins habituelle, certes, mais qui ne doit pas être occultée.

Décloisonnement également dans la réflexion abordant le cadre du secondaire qui est, dit un bibliothécaire, moins propice avec ses plages horaires de 50 minutes pour contacter les professeurs de français. "Mais, voilà, pourquoi se concentrer essentiellement sur les professeurs de français ? La collaboration avec la bibliothèque doit-elle passer exclusivement par des projets autour de la littérature ? "

Mais qui dit décloisonnement pense moyens et ressources !
Là aussi, l’unanimité existe.

« Nous ne savons pas tout faire, il nous faut des moyens supplémentaires ».

4. Propositions de modifications décrétales

 l’enseignement doit s’engager clairement par rapport à cette problématique des synergies « écoles-bibliothèques » : préciser clairement quelles sont les attentes et quels moyens ce secteur est disposé à consacrer à ces synergies ;

 il faudrait développer davantage de moyens humains (pourquoi ne pas prévoir, par exemple, des détachés pédagogiques ou des réserves d’animateurs spécialisés) ;

- dégager davantage de moyens financiers ;
être créatif dans les transferts ;

 mieux concentrer les budgets et mutualiser davantage les infrastructures.

 ne plus parler de public « captif » quand on évoque les enfants en bibliothèque ;

 revoir le cadre du personnel ;

 réfléchir à la création de Centres de Littérature de Jeunesse.

C’est par ces apports que se termina cet atelier très riche et foisonnant et qui abordait un sujet qui mériterait bien qu’on lui consacre une journée à part entière...