Ludothèque-CEC La Marelle, du jeu récréatif aux enjeux créatifs

Publié le 14 septembre 2015, par Françoise Vanesse, Sylvie Hendrickx


Pousser les portes de cette ludothèque, c’est découvrir…

Un partenaire du Centre Multimédia Don Bosco

Dans le quartier du Laveu sur les hauteurs de Liège, les bâtiments qui abritent le Centre Multimédia Don Bosco regroupent aujourd’hui une série de services permettant la mutualisation des expériences de chacun. Outre la bibliothèque, située au rez-de-chaussée, voici, aux étages supérieurs, un local informatique intégré à l’Espace Public Numérique reconnu par la Région Wallonne depuis 2009 et, à ses côtés, une salle de cours où le bibliothécaire, Guy Marchal, reçoit régulièrement des apprenants dans le cadre de cours d’alphabétisation. Un étage plus haut, vous découvrez un vaste local d’animation et de formations et, au troisième étage, le S.A.M., Service Animations Multimédia de la bibliothèque. Mais, comme vous pouvez le constater, le bâtiment est très vaste et ouvert à de nombreuses collaborations. C’est dans cette optique que ceux-ci abritent également et ce, depuis 2012, la ludothèque La Marelle, tout nouveau partenaire du Centre Multimédia Don Bosco.

Une double compétence

Pour vous rendre dans les locaux de La Marelle, au deuxième étage, rien de plus simple : suivez l’itinéraire ludique qui vous est proposé ! En guise d’accompagnement, voici une ribambelle de réalisations originales et artistiques : petits personnages amusants, mobiles déconcertants et lumineux composés de matériaux divers et inattendus. Le ton est donné ! En effet, La Marelle, à l’image de cette décoration très originale, est une structure atypique car elle propose, non seulement, une salle de prêt et de jeu mais également un CEC, Centre d’Expression et de Créativité. Celui-ci est hébergé au début du couloir, dans un petit local qui regorge de créations réalisées par les usagers, petits et grands, à l’occasion des ateliers. Quant à la salle de prêt et de jeu, vous la découvrez, un peu plus loin. Myriam Hick et sa collègue, Anne Willems prennent en charge la globalité des projets dans un esprit de complémentarité. Nous rencontrons Anne qui évoque avec nous les richesses de cette double compétence. « Dans notre structure, chacune est complémentaire de l’autre à l’image, d’ailleurs, de notre parcours professionnel. La profession de ludothécaire n’est en effet pas reconnue en Fédération Wallonie-Bruxelles contrairement à celle de bibliothécaire. Myriam a suivi une formation artistique et j’ai un diplôme de logopède. Cette situation induit, un peu par la force des choses, que nous abordons notre profession avec un important esprit d’ouverture et de mutualisation de nos acquis ».

Un service multiple et souple

Et en effet, cette souplesse de fonctionnement et cet important esprit d’ouverture se retrouvent dans l’organisation de la structure. La ludothèque, espace d’accueil tout public, avec sa spacieuse salle de jeu propose un service multiple : soit en accueillant des enfants seuls, soit des enfants accompagnés d’un adulte, parents ou grands-parents. Quant à l’atelier du CEC, il ouvre également plusieurs fois par semaine. « Dans la salle de jeu, nous accueillons et animons les enfants : le matin, les bébés et, l’après-midi, les enfants de plus de trois ans car ces deux catégories induisent évidemment des dynamiques de jeu très différentes. L’accueil est également assuré pendant les vacances scolaires car il est important pour nous de sortir du contexte quotidien et de permettre une grande souplesse dans les horaires mais aussi dans la façon de fonctionner. Ainsi chacun arrive et repart à tout moment que ce soit pour les ateliers ou l’espace jeu ».

Un espace de rencontre et d’écoute

Même esprit d’ouverture avec ce projet de la ludothèque qui se veut un espace de rencontre. « En effet, un des principaux objectifs de l’asbl, depuis sa création, est d’offrir un espace de rencontre au sens large, tout public, le jeu et la création étant des merveilleux prétextes pour entrer en relation avec autrui. » Quant à l’écoute, elle fait également partie intégrante des missions que se sont fixées les animatrices. « En effet, une importante part du travail réside, souvent de manière informelle, dans l’écoute et l’observation de la relation enfant-adulte au travers du jeu ou des ateliers créatifs car celles-ci sont souvent révélatrices de toute une série d’éléments notamment culturels ».

Des jeux pour petits et grands

Sur les hautes étagères qui composent le local principal de quatre-vingt m2, nous découvrons environ mille cinq cents boîtes de jeux, répertoriées et en partie renouvelées chaque année. A la portée des tout-petits les jouets pour moins de trois ans. Puis, voici, de plus en plus haut les jeux classés suivant un code couleur permettant aux enfants et aux adultes de se situer par rapport à des degrés de difficultés différents. Mais, là aussi, les animatrices restent prudentes par rapport à ces prescriptions ! « En trente ans de métier, nous constatons une évolution au niveau des stimuli : les enfants sont plus en mesure de répondre à des demandes et exigences plus élaborées, du moins chez un certain public ». Tout en haut des étagères, ce sont les jeux pour les plus grands c’est-à-dire les adultes. Ceux-ci font partie du public ciblé par la structure, non seulement au niveau de la ludothèque proprement dite mais également au niveau des ateliers du CEC : « Depuis notre déménagement, nous retrouvons une ludothèque comme celle que nous avons toujours souhaitée, avec des adultes qui participent, qui comprennent le projet de notre structure, des parents moins « courants d’air », qui s’engagent dans les animations que nous leur proposons. »(1)

Un rôle de médiateur

Anne et Myriam sont toujours à l’affût du jeu qui sort de l’ordinaire ! « Tout comme les bibliothécaires en matière de livre, nous essayons de remplir un rôle de médiateur pour aider les parents à se frayer un chemin parmi la masse de jeux. D’autant plus qu’il est encore plus difficile qu’avant de se fier au critère du nom comme gage de qualité. C’est pour cette raison que nous ne travaillons pas avec des marques particulières. » A côté des jeux atypiques, la ludothèque veille à disposer des grands classiques ! Mais là aussi les mentalités changent. « Il y a trente ans, il était inutile pour nous de posséder un jeu de l’oie, ou un jeu de dame. Ce n’est plus le cas et il est important pour nous de pouvoir proposer aux familles, de toutes origines, des fondements de notre culture du jeu. »

Des jeux pour grandir

La ludothèque propose également un grand nombre de jeux de coopérations, de jeux à thèmes qui permettent, dans le contexte d’une classe ou d’un autre groupement, de travailler certains domaines et de grandir. Cependant, la prudence reste de mise et les animatrices veillent à ce que le jeu ne soit pas instrumentalisé. « Nous travaillons beaucoup avec des enseignants ou des logopèdes pour les inciter à sortir du schéma du jeu didactique à tout prix. Notre credo c’est que, tout jeu bien utilisé, permet d’arriver à ses fins. Nous sommes convaincues qu’il n’y a pas d’intérêt à braquer l’enfant par le recours à un jeu très ciblé pour remédier à une défaillance, par exemple les règles grammaticales, alors qu’au moyen d’un jeu plus informel, on peut les travailler de façon tout aussi optimale. Cependant, la demande des parents pour ce type de jeu de remédiation reste cependant très forte. »

Une ludothèque-relais

Les contours du paysage dans lequel évoluent les ludothèques en Fédération Wallonie-Bruxelles restent flous. En effet, aucun Décret ne régit leur fonctionnement ce qui implique que chaque acteur se retrouve relativement isolé avec pour conséquence un important déficit au niveau du subventionnement de ces structures, parents pauvres du secteur culturel. Ainsi, la centaine de ludothèques présentes sur le territoire de la FWB ont, chacune, un statut particulier avec des dynamiques propres en fonction des instances dont elles dépendent. Pour pallier cette situation, une Fédération « LUDO », qui défend le secteur à tous niveaux, a été créée mais, fonctionnant avec des bénévoles, cette structure n’a pas les coudées très larges. « Toutes ces différences nous isolent les uns des autres dans notre travail, poursuit Anne, mais nous réagissons face à cette situation quelque peu handicapante et, du fait notamment de notre ancienneté à Liège, nous avons le statut de ludothèque-relais pour toutes les ludothèques qui se trouvent en Province de Liège. C’est pourquoi nous organisons des réunions d’échanges professionnels et coordonnons les partenariats lors de certains évènements ou manifestations inter-ludothèques tels que la Fête du jeu qui se déroule, tous les deux ans. »

Un CEC : un enjeu créatif

Cette question du subventionnement est la transition idéale pour évoquer la partie CEC, seule reconnaissance qui permet à la structure de tenir la route financièrement. Cet apport est certes non négligeable mais il est bien clair que, ce qui prime, c’est davantage l’important enjeu créatif qui est développé au cœur des ateliers. A l’instar de nombreux artistes reconnus qui ont marqué leurs créations d’une note ludique, Myriam et Anne proposent aux participants de s’emparer du moindre petit objet ou touche de couleur pour leur donner vie et sens. Le tout, guidé par l’esprit d’ouverture, si caractéristique de la structure : rencontres entre adultes, projets intergénérationnels ou tissage de partenariats avec des associations voisines.

Un lieu de synergies

En 2012, suite à un déménagement un peu impromptu, La Marelle a emménagé dans les locaux jouxtant le CMM Don Bosco ce qui a constitué un véritable tournant dans la vie de cette structure. Car l’intégration au sein d’un bâtiment qui abrite une panoplie de services différents reste une véritable aubaine pour instaurer de nombreuses synergies. « Nous accueillons très souvent les enfants des parents qui suivent les cours alpha ou les cours à l’EPN de la bibliothèque. Nous mettons en outre en place des partenariats avec ces différents services lors de nos activités respectives ce qui augmente la visibilité de chacun et permet de faire valoir mutuellement notre travail. » Le bâtiment en lui-même présente ses avantages : « Il nous offre de nombreuses salles attenantes à la bibliothèque, un bel espace qui nous permet d’accueillir plus de monde pour les grandes manifestations. » Et c’est par cette image d’une structure en soif d’interactions et de synergies, que ce soit en son sein ou avec l’extérieur, que nous terminons le portrait de « La Marelle » : charmante ludothèque accueillante et créative qui invite, petits et grands, à saisir le moindre petit caillou afin d’initier un parcours ludique : en quelque sorte, quitter le « terre à terre » et arriver jusqu’au ciel…

(1) Voir Article : Dialogue avec la Famille Totem dans la rubrique “Partages d’expériences”.