Regards croisés sur de la plume au pinceau

Lettera amorosa

Publié le 5 novembre 2007, par Gérard Durieux


Une réédition récente de cette œuvre de jeunesse doublée d’une trace du dialogue que le Poète a entretenu toute sa vie avec les peintres... ses « alliés substantiels »

CHAR René, Lettera amorosa, Poésie/Gallimard, 2007

Les publications abondent à l’occasion du centenaire de la naissance du poète vauclusien de l’Isle-sur-la-Sorgue (1907-1988). De quoi alimenter le débat entre ses admirateurs et ses détracteurs : les uns tiennent sa poésie abrupte et épurée jusqu’à la fulgurance pour « les pages les plus exigeantes et vivantes de la poésie contemporaine » ; les autres crient au « snobisme parisien » et dénoncent un mystificateur qui abusa des séductions de l’hermétisme.

Quoiqu’il en soit de la querelle, la réédition récente de cette œuvre de jeunesse pleine de santé et de fraîcheur, enluminée par Jean ARP puis par Georges BRAQUE, témoigne avec bonheur de la fraternité spirituelle qui unit l’art et la poésie.

Les illustrations de ARP, papiers découpés et collés, épousent la mélodie amoureuse de ce poème à l’Absente dont l’éditeur propose la version manuscrite de 1952 intitulée « Guirlande terrestre ».

On pourra être touché davantage par la seconde version du texte, écrite en 53, publiée en 1963 et illustrée par Braque : « Lettera amorosa ».
Car c’est au fil d’un long dialogue d’amitié, que le peintre et le poète, « alliés substantiels », nous offrent ici une œuvre commune, quasi neuve, où s’éclairent par touches de couleurs (oiseaux, fleurs, étoiles, visages...) la jubilation et « la félicité furtive de la terre des amants ».

Un petit ouvrage, tel un objet de simple beauté, que l’on se prend à feuilleter encore et encore, faisant son miel d’un mot (parhélie) ou du silence bleu d’un grand envol d’oiseaux.

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