L’emprise numérique

Publié le 15 juillet 2014, par Sylvie Hendrickx


Un essai militant sur l’emprise de la culture numérique doublé d’un plaidoyer pour la survie des marchés traditionnels du livre

BIAGINI Cédric, L’emprise numérique. Comment internet et les nouvelles technologies ont colonisé nos vies, Editions l’Echappée, 2012

Depuis sa création en 2005, la maison d’édition « L’Echappée » nous a habitués aux essais militants, parfois quelque peu anarchistes mais toujours résolument humanistes, qui proposent une pensée à contre-courant de notre société consumériste. Et l’on n’est guère déçu lorsque l’on découvre avec curiosité, presque avec gourmandise, la somme remarquablement étayée que Cédric Biagini, animateur de cette maison d’édition indépendante, consacre à la culture numérique et son emprise dans de nombreux domaines de l’activité humaine. En onze chapitres passionnants, ce diplômé en ingénierie mécanique et grand connaisseur des outils technologiques aborde, sans jargon, des thèmes aussi divers que le caractère faussement écologique des technologies de l’information, le webjournalisme, les entreprises commerciales cachées (ou non) derrière les réseaux sociaux ou encore certains usages prétendument démocratiques d’Internet. Criant la nécessité de préserver les librairies, les bibliothèques et surtout la culture dont elles sont les garantes, il consacre également non moins de septante pages à l’ebook, la bibliothèque virtuelle de Google et le marché du livre numérique. De manière plus globale, ce sympathique et jeune « vieux réac’ » interroge avec lucidité et force exemples le discours qui entoure ce qu’il désigne comme « la nouvelle religion d’internet » ou comment les médias numériques portent en eux la promesse fallacieuse de nous permettre d’échapper aux contingences matérielles et aux contraintes collectives.
Dans une réflexion sociologique et philosophique proche du mouvement de la décroissance, cet ouvrage très concret et intelligemment explosif analyse l’évolution de notre rapport au monde face au déferlement technologique et interroge l’ère de la dématérialisation au regard de notre condition humaine.